Potato bun
Un petit pain ultra moelleux au goût subtile, parfait pour un bon hamburger ou tout autre sandwich similaire. Pour certains, dont je suis, c’est même LE pain pour hamburger. Il est absolument incomparable par son moelleux et sa souplesse. C’est lui qui aurait fait le succès, entre autre, d’une chaine américaine de fast-food, Shake Shack Burgers dont les buns sont fabriqués par Martin’s, une marque réputée pour ses différentes variétés de pain, toutes incluant de la pomme de terre. La particularité recherchée ici est donc le moelleux et la souplesse du pain. On sait que ces qualités sont généralement dues au gluten, mais il y a un autre élément qui y participe grandement : c’est l’amidon. Or, la pomme de terre en est essentiellement composée.
La capacité de l’amidon à emmagasiner l’eau explique ici le merveilleux moelleux de ce pain et sa meilleure conservation. C’est d’ailleurs ce phénomène qu’utilisent les techniques asiatiques du yudane et du tangzhong. Des internautes argentins appellent joliment ce pain « el pan que no vuelve » : le pain qui ne revient pas. Quand on appuie dessus, il reste dans sa position au lieu de se regonfler comme un pain à hamburger classique. Toute cette humidité donne au pain une texture unique et néanmoins solide pour recevoir garnitures et sauces.
La pomme de terre
On peut utiliser directement de la purée de pomme de terre ou des flocons de pomme de terre du commerce (les fameuses purées instantanées). On pourrait utiliser de la farine de pomme de terre, mais on la trouve plus difficilement. Excepté la mouture, la farine et les flocons de pommes de terre sont obtenus de la même manière : les deux sont issus de pommes de terre préalablement épluchées, cuites et déshydratées jusqu’à un taux d’humidité de l’ordre de 8 %. La seule différence est la méthode de refroidissement pour créer des flocons plutôt que de la poudre. À ne pas confondre avec la fécule de pomme de terre, résultant de l’extraction de l’amidon de pommes de terre crues par des procédés physiques, et contenant jusqu’à 99 % d’amidon. Si l’on cuit spécialement des pommes de terre pour réaliser cette recette (très recommandé), on choisira d’utiliser leur eau de cuisson, pleine de cet amidon que l’on recherche, à la place de l’eau de la recette.
Quelle pomme de terre choisir ?
Les pommes de terre sont classées en 3 catégories :
- Type A : pommes de terre à chair ferme, pauvres en amidon et riche en eau, plutôt pour des salades.
- Type B : pommes de terre à chair fondante, à teneur moyenne en amidon, qui conviennent pour tous les usages et particulièrement la cuisson au four.
- Type C : pommes de terre à chair farineuse, riche en amidon et pauvre en eau, plutôt pour les soupes et les purées.
On comprend aisément qu’il nous faut choisir une pomme de terre du groupe C, riche en amidon, donc ayant la meilleure capacité d’absorption d’eau, et c’est ce qu’on recherche ici. Dans cette catégorie, les variétés les plus courantes sont par exemple la Bintje ou la Vitelotte. Mais certaines du groupe B (comme l’Agria), peuvent également convenir.
Quelle proportion de purée dans la pâte ?
J’ai consulté pas mal de recettes. Il y a visiblement plusieurs écoles. On trouve principalement des recettes utilisant 20 à 25% de purée par rapport au poids de farine : c’est ce que j’ai donc utilisé ici. Mais il existe aussi un groupe qui en inclut de 40 à 60% et un autre allant même de 80 à 110 % du poids de farine ! À essayer peut-être, mais le résultat obtenu avec 25% est déjà parfait.
Purée ou flocon de pomme de terre ?
En fait, c’est la même chose : la purée contient de l’amidon et de l’eau alors que les flocons contiennent essentiellement de l’amidon. La seule différence sera donc la quantité d’eau impliquée dans la recette. On peut donc modifier n’importe quelle recette de pain en une recette impliquant de la pomme de terre en tenant compte des indications généreusement données par le site de King Arthur Flour :
Pour ajouter de la purée de pomme de terre :
- Ajouter jusqu’à 45 g de purée de pomme de terre par 100 g de farine de la recette et réduire le liquide principal (eau ou lait) de 50%, puis mélanger la pâte. Ajuster la quantité de liquide au fur et à mesure du pétrissage en fonction de sa consistance.
Pour ajouter des flocons de pomme de terre :
- Remplacer 100 g de farine de la recette par 140 g de flocons de pommes de terre, dans une recette n’impliquant pas plus de 400 à 500 g de farine. Mélanger les flocons et la farine avant d’ajouter le liquide pour éviter les grumeaux.
Eau de pomme de terre
Bien entendu, après avoir cuit les pommes de terre destinées à la recette du pain, on utilisera l’eau de cuisson de ces pommes de terre (une fois refroidie). Bien qu’elle ne soit pas aussi chargée en amidon que la pomme de terre elle-même ou les flocons de pomme de terre, l’eau de cuisson remplacera avantageusement dans n’importe quelle recette de pain (même sans pomme de terre) l’eau ou le liquide principal de la recette. Il faut donc penser à conserver l’eau de cuisson des pommes de terre pour l’utiliser ultérieurement dans n’importe quelle recette de pain. Ceci est également valable pour l’eau de cuisson des pâtes qui contient également de l’amidon.
La dorure
Pour encore améliorer le moelleux du pain, on veillera à faire un dorure à l’œuf mélangé avec le même poids de lait. Cela fait une dorure assez liquide qui viendra encore ajouter à la préservation de l’humidité dans le pain.
La cuisson
Lorsqu’on parle de préserver l’humidité dans le pain, on prêtera une attention toute particulière à la cuisson. On ne donnera pas comme d’habitude un temps de cuisson, mais on indiquera 2 choses :
- La température de cuisson : ici on opte pour une température du four assez basse (160°C, chaleur ventilée)
- La température interne du pain en fin de cuisson : pas plus de 88 ∼ 90 °C. Au-delà de cette température à laquelle le pain est bien cuit, on engendre une perte d’eau qui viendrait à l’encontre de tout ce que l’on a fait jusque là pour préserver l’humidité, gage du moelleux et de la conservation du pain.
La recette
Ou plutôt les recettes, car la différence, comme on l’a vu plus haut, entre purée de pommes de terre et flocons de pommes de terre est assez faible. Pour 8 à 12 pains à hamburger selon leur taille :
Avec purée
400 g de farine de gruau Francine 12,1% de gluten
100 g de purée de pomme de terre
18 g de poudre de lait entier
8 g de sel non traité
24 g de sucre en poudre
20 g de levure fraîche
40 g de beurre doux
1 œuf entier (60 g)
150 g d’eau de cuisson des pommes de terre
Température de base : 60°
Avec flocons
400 g de farine de gruau Francine 12,1% de gluten
48 g de flocons de pomme de terre Mousline au lait entier
18 g de poudre de lait entier
8 g de sel non traité
24 g de sucre en poudre
20 g de levure fraîche
40 g de beurre doux
1 œuf entier (60 g)
250 g d’eau de source
Température de base : 60°
Préparer la purée de pomme de terre
Éplucher 300 g de pomme à chaire farineuse (Bintje pour moi) et la couper en morceaux.
Mettre les morceaux dans une casserole et couvrir d’eau froide.
Chauffer à feu fort jusqu’à l’ébullition, puis baisser le feu et laisser frémir pendant une vingtaine de minutes : la pointe d’un couteau doit s’enfoncer sans résistance. Inutile de les cuire à forte ébullition car cela pourrait entrainer une différence de cuisson entre l’extérieur et l’intérieur de la chaire, ainsi qu’une déstructuration due au violent bouillonnement.
Égoutter les pommes de terre et récupérer l’eau de cuisson.
Réserver l’eau de cuisson et la laisser refroidir à température ambiante.
Écraser les pommes de terre en purée à l’aide d’un presse-purée : il est important qu’il n’y ait plus de morceaux. Filmer au contact pour éviter le dessèchement et réserver jusqu’à refroidissement complet à température ambiante.
Préparer la pâte
Vérifier la température du liquide de coulage en fonction de la température de base indiquée. Pour moi, température ambiante = 20,9 °C et température de la farine = 20,9 °C. La température de l’eau doit donc être égale à 60 – 20,9 – 20,9 = 18,2°C. On ajustera cette température en divisant l’eau de cuisson ou de l’eau utilisée en deux parties, l’une que l’on mettra au réfrigérateur et une autre que l’on pourra réchauffer éventuellement au four à micro ondes, puis en mélangeant les deux en suivant cette page.
Couper le beurre en petits cubes et le laisser à température ambiante pour qu’il ramollisse.
Version avec purée
Peser tous les ingrédients et prélever 100 g de purée de pommes de terre : le reste peut être réserver à un autre usage.
Mélanger au fouet dans un récipient tous les ingrédients secs : farine, sel, sucre, poudre de lait et levure fraiche émiettée.
Dans le bol du robot équipé du crochet pétrisseur verser l’œuf, l’eau de cuisson refroidie et la purée. Remuer au fouet pour que la purée soit bien diluée et qu’il n’y ait plus de morceaux.
Ajouter les ingrédients secs par-dessus.
Version avec flocons
Peser tous les ingrédients.
Mélanger au fouet dans un récipient tous les ingrédients secs : farine, sel, sucre, poudre de lait, flocons de pommes de terre et levure émiettée.
Dans le bol du robot équipé du crochet pétrisseur verser l’œuf et l’eau.
Ajouter les ingrédients secs par-dessus.
Pétrissage
Pétrir à vitesse 1 (position « Min » pour moi) pendant 5 minutes, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de trace de farine visible.
Laisser reposer la pâte 10 minutes : cela permet à la farine de bien absorber l’eau.
Ajouter les morceaux de beurre d’un coup.
Pétrir à vitesse 1 (position « Min » pour moi) jusqu’à ce que tout le beurre soit absorbé : 7 minutes pour moi.
Passer à vitesse 2 (position 1 pour moi) jusqu’à ce que la pâte soit partiellement décollée des parois du bol : elle ne se décolle pas complètement du fond.
Laisser reposer la pâte 5 minutes et contrôler le voile de gluten : ici, il est très bien. Ceci est important car le pointage est court et il n’y aura donc pas beaucoup de chance d’améliorer le réseau de gluten par simple fermentation.
Pointage
Transférer la pâte sur un plan de travail (pas vraiment besoin de fariner car elle ne colle pas).
Bouler la pâte et lui donner de la force en la faisant riper sur le plan de travail à l’aide d’une corne ou d’un coupe-pâte. Cela permet de donner de la tension à l’enveloppe extérieure et dynamiser la fermentation.
Transférer la pâte dans un récipient en pyrex et laisser reposer 30 minutes à température ambiante (22,1 °C pour moi).
Division
Peser la pâte : ici, 810 g.
Transférer la pâte sur le plan de travail légèrement fariné.
La dégazer du plat de la main et couper en 8 parts, comme une tarte.
Égaliser le poids de chaque pâton à 101 g en répartissant des morceaux de pâte des plus lourds aux plus légers.
Mise en forme
Replier l’extérieur de pâton vers le centre, puis tourner de quelques degrés et refaire la même chose jusqu’à obtenir une surface extérieure bien lisse. Déposer le pâton coté soudure vers le bas.
Laisser détendre 10 minutes, couverts, sur le plan de travail. Cela permet au gluten de se relâcher un peu.
Façonnage
Bouler soigneusement chaque pâton sur le plan de travail non fariné. On utilise l’adhérence du pâton pour que le boulage soit efficace et retende bien la « peau » extérieure. Si l’on farine, le pâton ne fera que glisser sur le plan de travail sans qu’il soit générée de tension à sa surface.
Déposer les pâtons dans un moule à pain à hamburger en silicone (empreinte de 10 cm de diamètre) ou sur une plaque revêtue d’une feuille de papier sulfurisé.
Apprêt
Couvrir les pâtons pour éviter le dessèchement.
Laisser fermenter 2 heures à température ambiante (21,8 °C pour moi).
Les pâtons doivent remplir complètement l’empreinte à la fin de l’apprêt.
Vérifier l’avancée de l’apprêt après 90 minutes en appuyant légèrement du bout du doigt sur la pâte. Si l’empreinte disparait rapidement, il faut prolonger l’apprêt. Si l’empreinte disparait au bout de 2 secondes, on peut procéder à la cuisson. Si l’empreinte persiste, il est presque trop tard : il faut se dépêcher d’enfourner.
Dorure
Une demie heure avant la fin de l’apprêt, allumer le four à 160 °C, chaleur ventilée, avec une grille au niveau 2 (1 est le plus bas, 4 la plus haute) et une lèchefrite glissée au-dessous.
Préparer un petit récipient avec 30 ml d’eau bouillante.
Peser un œuf dans un bol (59 g pour moi) et ajouter la même quantité de lait.
Battre l’ensemble au fouet en ajoutant une pincée de sel.
Dorer délicatement chaque pâton à l’aide d’un pinceau en silicone : procéder avec douceur, c’est plein de bulles là-dedans.
Cuisson
Enfourner les pains en versant les 30 ml d’eau bouillante sur la lèchefrite : on a besoin de vapeur pour cette recette.
Préparer un thermomètre à sonde.
Après 12 minutes de cuisson, ouvrir le four et introduire la sonde de température au centre d’un des pâtons.
Refermer le four pour continuer la cuisson.
Dès que la température atteint 88∼89 °C, sortir les pains du four. Les pains sont légèrement colorés, mais on ne cherche pas une forte coloration. Il m’a fallu 13 minutes de cuisson et ma température interne était de 89 °C.
Ressuage
Démouler et déposer les pâtons sur une grille pour le refroidissement.
Sans attendre, procéder à une seconde dorure pendant que les pains sont encore chauds. Cette opération apporte une petite brillance à la croûte : elle est donc plus esthétique que vraiment utile au moelleux du pain. À chacun de voir ce qu’il préfère.
Laisser refroidir complètement avant utilisation.
Poids après cuisson
Chaque pain pèse 95 g, ce qui indique une faible perte d’eau (6%) par rapport au 101 g du pâton. Tant mieux, c’est ce qu’on cherche !
Quelle version utiliser entre purée ou flocons de pommes de terre ?
Comme on l’a vu plus haut, flocons ou purée, c’est toujours de l’amidon, seule la quantité d’eau change. Le résultat est donc parfaitement identique que l’on utilise l’un ou l’autre.
Il faut juste choisir la version qui convient le mieux à chacun :
- Les flocons sont plus pratiques, car il n’y a aucune préparation. Il faut choisir des flocons natures, non aromatisés genre « à la noix de muscade » ou autre.
- La purée réalisée pour la recette permet de récupérer l’eau de cuisson, ce qui est avantageux. Par contre, il faut faire attention au choix de la variété de pommes de terre : farineuse, riche en amidon comme vu ci-dessus.
À ce propos, il existe un petit test pour vérifier la teneur en amidon d’une pomme de terre. Il suffit de la plonger dans une solution saline à 11% (110 g de sel dans 1000 g d’eau). La pomme de terre pauvre en amidon flotte, la pomme de terre ayant un taux d’amidon intermédiaire se situe quelque part entre la surface et le fond alors que la pomme de terre riche en amidon (celle qu’on veut) coule au fond.
Peut-on congeler ces pains ?
Oui, très facilement, en les emballant dans un sac congélation. Pour les décongeler, il suffit de les mettre 50 minutes dans un four à 50 °C (position « décongélation » pour moi).