Le pain de Lodève est né dans cette petite ville de l’Hérault dont il porte le nom et a été diffusé grâce aux foires et aux marchés qui s’y tenaient jadis. C’est l’ancêtre de tous les pains français non façonnés et il est avéré que cette façon de faire remonte à plusieurs siècles. Il est traditionnellement réalisé avec un seul pointage en masse dans des corbeilles allongées en paille de seigle, appelées paillasses, puis débiter juste avant l’enfournement, sans façonnage ni apprêt. C’est une pâte très hydratée sur levain, assez molle et un peu délicate à manipuler. J’ai utilisé ici une recette professionnelle des Moulins Bourgeois que j’ai adaptée au matériel domestique.
Ingrédients, pour 3 pains d’environ 330 g chaque :
500 g de farine T65 bio Celnat 12,8% de gluten
200 g de levain liquide (100% d’hydratation) mûr
10 g de sel
2,5 g de levure fraîche
380 ml d’eau
Température de base : 60°C – TH = 80% avec le levain
Je suggère de réaliser cette recette sur 2 jours selon le schéma suivant :
J-2 18h00 : rafraîchi du levain avec la même farine que la recette.
J-1 11h00 : rafraîchi du levain avec la même farine que la recette.
J-1 17h00 : fabrication de la pâte
J-1 18h30 : mise au froid pour la nuit
J0 7h00 : fin de la recette et cuisson
J0 12h00 : le pain est prêt !
La pâte étant très hydratée, il est plus facile d’utiliser un robot équipé de la feuille. A la main, il faudra utiliser la méthode d’Emmanuel Hadjiandreou.
Fabrication de la pâte :
Peser tous les ingrédients.
Tamiser la farine.
Verser le levain dans le bol du robot.
Émietter la levure dessus.
Verser 380 g d’eau dans le bol du robot en respectant au mieux la température de base indiquée ci-dessus.
Mélanger 1 minute à vitesse 1.
Dans un récipient, mélanger le sel à la farine au fouet danois et ajouter l’ensemble dans le bol du robot.
Fraser à vitesse 1 pendant 5 minutes.
Passer à vitesse 2 et pétrir (toujours à la feuille) pendant 10 minutes : la pâte finit par se décoller des parois sauf du fond qui adhère toujours un peu.
Huiler ou fariner généreusement le plan de travail.
Transférer la pâte dessus en s’aidant d’une corne : c’est très collant, ce qui est normal.
Étirage / Soufflage :
Avec les mains farinées ou huilées, faire un rabat (nord-sud, est-ouest) en enlevant à chaque fois le surplus de farine à l’aide d’une brosse souple. S’aider d’une corne pour décoller la pâte. Refaire au besoin cette opération en fonction de la force de la pâte, mais pas plus de 3 fois en tout. Bouler grossièrement en faisant tourner le pâton sur le plan de travail.
Note : pour cette phase, il est préférable d’huiler le plan de travail. En effet, ça marche aussi en farinant mais lorsque l’on s’aide de la corne pour faire glisser la farine sous la pâte, il se forme des « bouloches » un peu dures qu’il vaut mieux éviter, car on ne peut pas les enlever.
Huiler généreusement un bac avec couvercle : j’utilise un Tupperware® carré. Il est important de ne pas lésiner sur l’huile car, le pain n’étant pas façonné, la « forme » en rectangle que l’on recherche sera donnée à la pâte au moment où on la versera sur le plan de travail. Si la pâte colle trop aux parois du récipient, on n’obtiendra pas ce rectangle à peu près régulier et surtout, pour rectifier la forme, il faudra manipuler la pâte avec risque de la dégazer, ce que l’on ne veut pas.
Laisser la pâte sur le plan de travail fariné ou huilé, la recouvrir avec un récipient et laisser pointer 1 heure à température ambiante en faisant un rabat sur plan de travail au bout de 30 minutes.
A la fin du pointage à température ambiante, faire un rabat sur plan de travail huilé, mettre en bac huilé et entreposer au réfrigérateur pour la nuit (idéalement à 4°C).
Le jour J, sortir la pâte du réfrigérateur et laisser tempérer sur le plan de travail pendant 3 à 4 heures : la mienne est revenue à 21°C au bout de 4 heures pour une température ambiante de 23°C. On peut accélérer le retour à température en mettant la pâte dans un four éteint préalablement préchauffé à 30°C.
Préchauffer le four à 250 °C, chaleur conventionnelle (sole et voûte) avec une pierre à pain à l’intérieur en position basse et une lèchefrite au niveau le plus bas, sous la pierre à pain. La pierre doit chauffer au moins une heure avant l’enfournement.
Pesée : pour éviter de dégazer, et compte tenu de la mollesse de la pâte lors des manipulations, il n’y a ni pesée ni façonnage dans cette recette. J’ai quand même fait une pesée pour avoir une idée du poids de pâte avant cuisson. Poids de la pâte dans son récipient 1374 g, dont on ôte le poids du récipient une fois la pâte versée sur le plan de travail, 267 g, cela donne un poids net de 1007 g.
Préparer une couche bien farinée ou une plaque de cuisson revêtue d’une feuille de papier sulfurisé.
Bien fariner le plan de travail et décoller les bords de la pâte du récipient avec une corne éventuellement huilée. Renverser la pâte sur le plan de travail d’un geste rapide en laissant faire la gravité. Si la récipient a été bien huilé, ça devrait se passer facilement et toute la pâte devrait se retrouver en forme d’un carré ou d’un rectangle sur le plan de travail. Il a fallu que j’aide à décoller le dernier coté délicatement avec une corne : l’idée est de dégazer le moins possible (voir plus haut).
Étirer la pâte en un rectangle grossier sans dégazer.
Bien fariner le rectangle de pâte : cela facilitera la découpe et empêchera le coupe-pâte de trop adhérer à la pâte.
A l’aide d’un coupe-pâte, diviser en 3 bandes. Il faut couper franchement et faire glisser le coupe-pâte en contact avec le plan de travail pour séparer la bande du pâton au fur et à mesure.
Vriller chaque bande en commençant par le milieu. La pâte étant molle, c’est un peu délicat, mais on fait au mieux, on ne cherche pas la perfection. J’ai vrillé 2 bandes et j’en ai laissé une telle que, comme on le voit sur les photos. On aurait pu aussi ne couper que 2 bandes pour 2 gros pains, ou bien couper le rectangle en 4 gros pavés comme pour les pavés rustiques.
Déposer chaque pain sur la couche en faisant un pli pour les séparer ou les déposer sur la plaque de cuisson.
Laisser reposer 20 minutes, couvert, à température ambiante : c’est l’apprêt qui est en fait juste une détente.
Préparer un petit récipient avec 30 ml d’eau bouillante.
A l’aide d’une réglette, transférer les pains de la couche vers la pelle à pain revêtue d’une feuille de papier cuisson en la faisant basculer à chaque fois.
Enfourner la plaque de cuisson ou faire glisser les pains de la pelle sur la pierre à pain et verser aussitôt 30 ml d’eau dans la lèchefrite.
Cuire entre 25 et 30 minutes en surveillant la coloration (ma fournée a cuit 26 minutes).
Température interne : 98°C.
Laisser refroidir sur grille.
Poids après cuisson : 880 g pour les 3 pains, soit une perte d’eau de 13%. En réalité, mes pains faisaient respectivement 234, 307 et 337 g après cuisson. Une telle disparité est normale puisqu’on n’a rien pesé tout exprès !
La croûte est fine et bien croustillante, la mie très alvéolée. Pour moi, le résultat d’un pointage long, d’un apprêt court ou inexistant et d’une pâte très hydratée.
Ce pain s’accommode très bien de graines (45 g de graines trempées dans 45 g d’eau pendant 1 heure pour la pâte, plus pour saupoudrer la surface) ou de cerneaux de noix (80 g de cerneaux torréfiées 20 minutes dans un four ventilé à 160°C pour la pâte).